Si tu as un problème prends un livre !
Avec une très grande sincérité, j’ai entendu une enseignante que je respecte énormément faire cette remarque : « mais je ne sais pas ce qu’il/elle perçoit ». C’est vrai qu’il peut être déroutant de de communiquer avec des personnes qui n’ont pas de communication orale fonctionnelle… Alors vous imaginez enseigner !
Comment enseigner à un élève qui ne répond pas à la question qu’on va lui poser ? Comment enseigner à un élève qui présente un visage peu expressif ?
C’est une vraie question !
C’est un psychologue, lui-même frère d’un adulte ayant un trouble du neurodéveloppement qui a verbalisé le plus beau conseil lors d’une journée de préparation d’un colloque: « Ecoutez les ! » le ton sur lequel ces deux mots ont été assénés n’était guère sympathique mais il m’a ce jour là conforté dans ma démarche, celle de dévorer de manière compulsive tous les ouvrages autobiographiques en lien avec l’autisme d’une part mais aussi avec l’absence de communication orale.
Parmi les livres sur l’autisme, les références sont pléthoriques et je ne prétendrais pas avoir lu l’exhaustivité. Avec Hugo en ce moment nous découvrons bienvenue dans mon monde de Paul El Kharrat, cela nous permet comparer nos expériences, de parler de sujets qui fâchent à la maison aussi. Bref, c’est une activité complémentaire et aussi importante que les séquences de rééducation, bien qu’elles apportent des éléments différents. Les livres permettent à Hugo de percevoir des perceptions différentes mais semblables de la réalité, de créer un lien, d’avoir l’impression de faire partie d’un monde.
Les livres concernant les personnes non oralisantes sont beaucoup moins nombreux. On pense immédiatement au scaphandre et au papillon de Jean Dominique Bauby. D’autres ont également été écrits par des personnes souffrant du même syndrome. Particulièrement intéressant pour les parents car ils parlent de l’impact sur la vie quotidienne, ces livres écrits par des adultes qui perdent l’usage de la parole montrent le maintient de la pensée malgré l’absence de parole. On pourrait ainsi citer ceux de Philippe Vigand, légume vert et putain de silence, celui de d’Angèle Lieby, une larme m’a sauvée. Ces livres sont assez faciles à trouver, même d’occasion.
Mais en tant qu’enseignant, ce qui est important c’est également d’avoir l’avis de jeunes qui ont pu apprendre malgré l’absence de communication orale. Aucun livre ne traite exclusivement de la question des apprentissages et de la scolarité. Mais le livre Martin Pistorius, Quand j’étais invisible m’a bouleversé et je ne suis pas la seule.
Nous avons ensuite dévoré avec Hugo celui de Philippe Aubert, Rage d’exister. Philippe nous dit l’importance de l’accompagnement scolaire et son livre est essentiel à ce titre pour toute personne qui s’intéresse à la question des apprentissages. Il fut aussi essentiel pour Hugo qui a trouvé au fil des pages une personne à qui il pouvait s’identifier.
Chaque texte permet de comprendre la spécificité des problèmes rencontrés par une personne. Ainsi lire le livre d’Emilie Wash, tranches de vie m’a permis de questionner les adaptations proposées pour obtenir le BAC.
Celui qui m’aide le plus à comprendre comment on peut enseigner à une personne dont la communication orale n’est pas fonctionnelle reste mon fils. Hugo par sa fréquentation au quotidien. Alors vous n’aurez pas la chance de passer autant de temps que moi avec lui mais vous pouvez tout de même profiter de certaines de ses réflexions. Il publie des poèmes régulièrement sur les réseaux sociaux et vient de sortir son deuxième recueil de poèmes, Ma différence . (catalogue de l'éditeur)
Et moi je vais continuer ma collection de témoignages...Ils me sont essentiels pour comprendre, pour percevoir les spécificités de chacun et essayer de saisir au plus l'unicité de chacun. Plus grande sera ma collection, plus grande sera ma capacité d’écoute et donc plus ce sera facile de trouver des solutions pertinentes pour être en lien, partager mais aussi et surtout accompagner dans les apprentissages !
